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Mise en service du LINAC de SPIRAL2 et démarrage de l’installation NFS: retour sur une année de montée en puissance progressive

Nouvelle puissance faisceau record en sortie LINAC SPIRAL2.

Le GANIL met en service son nouvel accélérateur linéaire supraconducteur (LINAC – Figure 1). Cet accélérateur de forte puissance dote le GANIL de nouvelles possibilités en terme de faisceaux au service de la recherche en physique nucléaire. En fournissant des faisceaux d’une intensité allant jusqu’à 5 mA (3×1016 particules par seconde) le LINAC de la nouvelle installation SPIRAL2 (Système de Production d’Ions Radioactifs en Ligne de 2nd génération) permettra aux différents programmes scientifiques et techniques du GANIL de franchir de nouvelles frontières.

Figure 1 : vue de l’accélérateur linéaire Spiral2 avec les douze premiers cryomodules conçus par le CEA/Irfu et intégrés et testés au DACM, et les sept derniers conçus par le CNRS.
© P.Stroppa/CEA

Un faisceau de protons de 16 kW a été délivré par le LINAC de SPIRAL2 fin novembre 2020. Cela représente 10% de la puissance maximale de la machine en protons et marque un jalon d’importance pour le projet. La montée en puissance s’est faite progressivement, selon le schéma prévu en 4 phases permettant de maitriser les risques et de valider l’accélération des faisceaux (Figure 2). Les deux premières phases ont été réalisées en 2019 avec un faisceau de très faible intensité, permettant de ne pas endommager la machine en cas de perte de particules.

Depuis la reprise des activités à la sortie du premier confinement en 2020, de gros efforts ont été fournis par les équipes afin d’entamer une montée en puissance progressive du courant faisceau jusqu’à son intensité pic nominale. De nombreuses études machine ont permis de résoudre une à une les différentes difficultés inhérentes au fonctionnement d’une machine d’une telle puissance. Le 10 octobre 2020 un faisceau de 4.8 mA a été accéléré, représentant la fin de la phase 3 de montée en puissance dans le respect des règles d’exploitation d’une INB. Elle démontre la maitrise de la pleine intensité faisceau.

 

Figure 2 : Phases et jalons de la montée en puissance de SPIRAL2

Le 18 novembre dernier, un faisceau d’une puissance de 16 kW a été accéléré jusqu’à l’arrêt faisceau principal de l’accélérateur (Figure 3). Il démontre la maitrise du niveau de pertes faisceau extrêmement faible, inférieur à une dizaine de watts dans toute la machine. Ce contrôle des pertes a été rendu possible grâce à une très bonne compréhension de la physique de l’accélération, fruit de nombreuses simulations et calculs d’erreurs, et par l’optimisation de plusieurs techniques de pointe comme le réglage des asservissements de l’injection de l’onde RF au passage du faisceau ou l’utilisation de fonction avancée comme le « feedforward » des cavités, mis au point par l’Irfu/DIS au sein de l’électronique de contrôle LLRF que ce laboratoire a développé. A noter que durant toutes ces phases, le GANIL a pu s’appuyer sur l’expertise RF du DACM en particulier durant le conditionnement des cavités ainsi que sur un soutien actif en optique faisceau en particulier concernant l’amélioration du modèle théorique de la machine basée sur les outils de simulation du DACM.

Figure 3: Obtention des 16 kW de proton dans l’accélérateur SPIRAL2 en novembre 2018.

Ce dernier jalon valide les très bonnes performances de l’accélérateur et permet d’envisager sereinement la montée en puissance finale vers la valeur nominale de 200 kW qui sera obtenue en accélérant un faisceau de deutérium de 5 mA. Cet objectif commence dès maintenant par le réglage de faisceaux d’hélium pour préparer les faisceaux de deutérium qui seront produits en 2021. L’exploitation des faisceaux du LINAC par les Physiciens débutera à l’automne 2021.

 

 

Mise en service de l’installation Neutrons For Science au GANIL

L’installation NFS (Neutrons For Science) a reçu les premiers faisceaux de protons délivrés par l’accélérateur linéaire de la nouvelle installation SPIRAL2 du GANIL en décembre 2019. En marge de la mise en service progressive de l’accélérateur en 2020, de courtes périodes de faisceau ont été mises à profit pour tester avec succès plusieurs éléments de NFS. Les premières expériences sont prévues auprès de l’installation à l’automne 2021.

Un premier faisceau de protons accélérés à 33 MeV a été envoyé en décembre 2019 dans la station d’irradiation de NFS (figure 1), couplée à un système de transfert pneumatique permettant de transporter les échantillons irradiés jusqu’à une station de mesure. Les sections efficaces de production de plusieurs noyaux obtenus par irradiation d’échantillons de fer et de cuivre ont ainsi été mesurées. Les résultats de ce test sont en accord avec les données précédemment publiées. Le dispositif d’irradiation et de mesure, construit et opéré par des physiciens du laboratoire NPI de Rez (République Tchèque), sera utilisé dans le futur pour des mesures inédites de sections efficaces de réaction par activation.

Figure 1 : Photographie de la station d’irradiation de l’installation NFS.

Les premiers neutrons produits par l’interaction d’un faisceau de protons avec des cibles (convertisseurs) minces de lithium et de béryllium ont été produits en septembre 2020. Le spectre en énergie et le flux des neutrons produits à zéro degré ont été mesurés avec un détecteur constitué d’une cellule de scintillateur plastique couplé à un photomultiplicateur. L’énergie des neutrons était déterminée par la technique du temps de vol, c’est-à-dire par la mesure du temps que les neutrons mettent à parcourir la distance séparant leur point de production du détecteur. Les caractéristiques temporelles du faisceau (largeur en temps d’une bouffée de neutrons et fréquence de ces paquets) autorisent la mesure de l’énergie des neutrons sur tout le domaine en énergie (1-30 MeV) avec une bonne résolution. Le spectre des neutrons générés par l’interaction des protons avec des cibles minces de lithium et de béryllium est quasi mono-énergétique comme le montre la figure 2.

Figure 2 : Spectre quasi mono-énergétique des neutrons produits à 0° lors de l’interaction d’un faisceau de proton de 31,9 MeV avec les convertisseurs fins de lithium et de béryllium.

Un convertisseur rotatif plus épais en Béryllium conçu pour supporter un dépôt de puissance de 2 kW correspondant à un faisceau de deutons de 40 MeV à une intensité moyenne de 50 µA a été réalisé par le DIS/Irfu. Les compétences de DIS allant des calculs thermiques, de la conception et la réalisation mécanique à l’électrotechnique et l’automatisme, leurs équipes ont conçu, réalisé, monté et mis au point l’ensemble robotisé. Celui-ci permet de charger une cible d’épaisseur variable, puis de piloter sa rotation et de surveiller son intégrité sous 2 kW de deutons. Une gestion à distance permet finalement de garantir le chargement et le déchargement de la cible à l’intérieur de la chambre à réaction jusqu’à sa mise en stockage.

Ce dispositif est essentiel pour la réalisation des futures expériences sur NFS car il permettra de produire les flux de neutrons les plus intenses. Les deutons n’étant pas encore disponibles auprès du LINAC au moment du test, c’est un faisceau de protons de 31,9 MeV qui a été utilisé. Le spectre en énergie des neutrons mesuré par la méthode du temps de vol est présenté sur la figure 3. Dans ce cas le spectre en énergie est continu. Comme illustré dans la figure, il est en très bon accord avec des données antérieures. Des tests de puissance ont également été réalisés au cours desquels l’évolution de la température en différents points du convertisseur était mesurée en fonction de la puissance de faisceau déposée. Une puissance de 1350 W a été atteinte et les températures mesurées sont en accord avec les valeurs simulées.

Figure 3 : Spectre en énergie des neutrons produits par l’interaction d’un faisceau de proton de 31,9 MeV avec un convertisseur épais de béryllium.

Enfin au cours l’automne 2020, une première expérience test a été réalisée à l’aide du détecteur MEDLEY. Il est constitué d’une chambre à réaction contenant plusieurs télescopes (Si-Si-CsI) permettant de détecter les particules chargées légères émises par une cible placée dans la trajectoire des faisceaux de neutrons. Les signaux générés par ces détecteurs étaient traités par des modules électroniques NUMEXO2 réalisés au GANIL. Deux cibles de CH2 et de C ont été utilisées. La figure 4 montre un exemple de spectre produit à l’aide de deux détecteurs d’un télescope permettant l’identification des particules chargées légères émises au travers de leurs pertes d’énergies dans les détecteurs (∆E1-∆E2).

Figure 4 : Matrice d’identification en perte d’énergie (∆E1-∆E2) des particules charges émises par une cible de CH2 irradiée par un faisceau quasi mono-énergétique de neutrons.