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Développement d’un dosimètre à scintillation pour le contrôle des traitements en proton thérapie

Une équipe de scientifiques du GANIL a développé un dosimètre à scintillation nommé SCICOPRO (SCIntillation pour le COntrôle des irradiations en PROtonthérapie) en collaboration avec le Laboratoire de Physique Corpusculaire de Caen et le Centre de Lutte Contre le Cancer François Baclesse. L’étude réalisée a permis de développer un système de dosimétrie dont les performances sont adaptées au contrôle qualité des traitements en protonthérapie et de réduire le temps dédié à cette tâche.

Le système développé (Figure 1 A) est basé sur l’utilisation d’un scintillateur plastique de 10x10x10 cm3 qui a la propriété d’émettre de la lumière visible (scintillation) lorsqu’il est irradié. Une caméra CMOS ultra-rapide permet d’enregistrer la scintillation produite par chaque faisceau élémentaire délivré en protonthérapie. Un miroir placé à 45° par rapport au cube permet d’acquérir deux vues du scintillateur (Figure 1 B).

Les images des pulses sont alors sommées pour reconstruire les images des faisceaux et analysées afin de déterminer leurs caractéristiques. En effet, les distributions lumineuses mesurées sont représentatives du dépôt d’énergie des protons. La position de la distribution lumineuse dans l’image permet donc de retrouver la position du faisceau dans le référentiel de la salle de traitement, la profondeur de la distribution est déterminée par l’énergie du faisceau et l’intensité lumineuse par son intensité.

 

Figure 1 : A) Dispositif expérimental sur la table de traitement. Il est composé d’un cube scintillant de 10  10  10 cm3, d’un miroir orienté à 45° par rapport au cube et d’une caméra rapide. B) Image typique acquise lorsque le cube est irradié par des faisceaux de protons verticaux. La caméra enregistre une vue directe du pulse sur le côté droit de l’image et une vue réfléchie par le miroir sur le côté gauche de l’image.

Evaluation des performances

Dans un premier temps, les performances de SCICOPRO ont été évaluées à l’aide de faisceaux de caractéristiques connues. Cette évaluation a permis de démontrer que SCICOPRO était capable de mesurer toutes les caractéristiques des faisceaux composant un plan de traitement (plusieurs centaines à plusieurs milliers) en une seule acquisition, avec une précision de l’ordre de 580 µm sur la position, 180 keV sur l’énergie et 3 % pour l’intensité. Ces performances sont très prometteuses et répondent aux besoins de la pratique clinique.

Vérification de plans de traitements de protonthérapie

Après la validation de ses performances, SCICOPRO a été utilisé pour vérifier l’accord entre les caractéristiques des faisceaux délivrés par le système d’irradiation et les caractéristiques planifiées en amont du traitement. Pour cela, divers plans de traitements de patients ont été étudiés. La Figure 2 présente un exemple de mesure des caractéristiques des faisceaux réalisée avec SCICOPRO dans des conditions d’irradiation nominales. Par souci de clarté, seules les valeurs mesurées sont représentées, mais elles correspondent aux valeurs planifiées.

 

Figure 2 : Caractéristiques des faisceaux d’un traitement (position, énergie et intensité en échelle de couleurs – exprimée en unité machine MU) mesurées avec SCICOPRO.

Des mesures ont également été effectuées en introduisant des erreurs de positionnement de la table de traitement, afin de tester la capacité de SCICOPRO à les détecter. Ces tests ont montré qu’il était possible de détecter des erreurs d’orientation aussi petites que 1°.

Impact en protonthérapie

L’utilisation de faisceaux de protons en radiothérapie est avantageuse par rapport aux photons, car les particules chargées ont un parcours limité, qui permet de mieux épargner les tissus sains dans de nombreuses indications. En plus de cette caractéristique, les traitements de protonthérapie sont de plus en plus souvent délivrés à l’aide de faisceaux fins balayant le volume de la tumeur, ce qui permet une meilleure conformation du dépôt de dose à celui-ci.

Néanmoins, le nombre de faisceaux fins nécessaires à un traitement peut atteindre plusieurs milliers, et leur délivrance est divisée en plusieurs fractions (ou pulses) non consécutives afin de minimiser l’incertitude sur l’intensité délivrée au cours du traitement. Les pulses sont délivrés à 1 kHz, soit un pulse toutes les millisecondes.

La vérification des caractéristiques des faisceaux planifiés (positions X et Y, énergie E et intensité I) pour un traitement constitue donc un défi et une tâche chronophage en clinique, d’autant que les outils de dosimétrie sont moins nombreux en protonthérapie qu’en radiothérapie par photons. La plupart des dosimètres commerciaux présentent des limitations telles qu’une résolution spatiale et temporelle réduites, et ne permettent que des mesures à 1 ou 2 dimensions. La vérification de toutes les caractéristiques nécessite donc de multiples mesures avec différents détecteurs.

Pour surmonter ces limitations et fournir un système permettant de réduire le temps consacré au contrôle qualité en clinique, les détecteurs à scintillation sont très prometteurs. Ils présentent une très bonne résolution spatiale (< 1 mm) et ont le potentiel de permettre des mesures en 3 dimensions. Les progrès des caméras en termes de vitesse d’acquisition constituent également une opportunité dans ce domaine en permettant la vérification des traitements par faisceau fin. La taille du prototype limite la taille des champs d’irradiations considérés à 6 ´ 6 cm². Toutefois, un prototype plus grand basé sur un scintillateur de 25 ´ 25 ´ 25 cm3 est également à l’étude. En outre, les mesures présentées ici se limitent à la vérification des caractéristiques des faisceaux fins. Le dosimètre pourrait permettre un contrôle plus complet du traitement avec la mesure de la distribution en 3 dimensions de la dose déposée lors du traitement. Ceci fait actuellement l’objet d’une thèse.

https://aapm.onlinelibrary.wiley.com/doi/10.1002/mp.17388