Actualités
Contact
Olivier Sorlin (GANIL) et Miguel Marques (LPC Caen)
référence
A. Revel et al., Physical Review Letters 120, 152504 (2018)

DOI : https://doi.org/10.1103/PhysRevLett.120.152504
Partager cet article
Actualités à la une
avril 5, 2024
Call for applications 2025 Visiting Scientist at GANIL, France
décembre 14, 2023
Focus sur le spectromètre gamma AGATA
octobre 1, 2023
Rapport scientifique annuel 2022
avril 19, 2018

Des paires de neutrons corrélés témoignent de la superfluidité nucléaire

Une équipe menée par des physiciens du GANIL et du LPC Caen a mis en œuvre, au sein de la collaboration R3B de l’installation GSI en Allemagne, une méthode innovante qui permet d’étudier la superfluidité de la matière nucléaire en extrayant des paires de neutrons du noyau atomique de manière très soudaine. Le noyau de carbone-18, étudié avec cette méthode, présente les corrélations entre neutrons les plus importantes jamais observées. Ce travail vient d’être mis en exergue par l’éditeur de la revue Physical Review Letters*.

La notion de superfluidité est associée à des phénomènes fréquemment rencontrés en physique du solide lorsque la matière est portée à une très basse température. Elle se caractérise par exemple par une très forte diminution de la viscosité lors de l’écoulement de l’hélium liquide, ou encore par une très faible résistance au passage du courant électrique dans les matériaux supraconducteurs.

Le noyau atomique a sans doute lui aussi un comportement superfluide, généré par le fait que ses constituants, les nucléons, ne se déplacent pas totalement indépendamment les uns des autres, mais souvent par paires. Ce comportement superfluide se manifeste en particulier lors des mouvements de vibration ou de rotation des noyaux, ainsi que par la sur-stabilité des noyaux ayant un nombre pair de neutrons ou de protons par rapport à leurs voisins impairs. Mais il ne s’agit là que d’observations indirectes de l’appariement des nucléons. En effet, ceux-ci sont prisonniers du noyau par l’action de l’interaction nucléaire forte et on ne peut pas caractériser leur appariement, comme par exemple la distance qui les sépare.

Une équipe menée par des physiciens du GANIL et du LPC Caen a mis en œuvre, au sein de la collaboration R3B de l’installation GSI en Allemagne, une méthode innovante qui permet d’étudier des paires de neutrons en les extrayant du noyau atomique de manière très soudaine, hors de la portée de l’interaction du noyau. Des noyaux carbone-18 (isotope riche en neutrons : 6 protons pour 12 neutrons) ont été produits dans des états fortement excités, permettant à des paires de neutrons de s’en échapper. Lors de l’expérience, les chercheurs ont observé grâce au multi-détecteur de neutrons LAND qu’au sein d’une même paire, les caractéristiques d’un neutron étaient fortement dépendantes de celles de l’autre. Le degré de corrélation entre les neutrons éjectés est le plus fort jamais observé à ce jour dans un système quantique. Cette découverte va permettre d’affiner la modélisation des forces d’appariement des nucléons dans le noyau atomique, prélude à une meilleure description de ses propriétés superfluides.

Analyse du mode de décroissance d’un carbone-18 très excité, qui se transforme en carbone-16 plus deux neutrons. Le pic étroit observé montre que la plupart des neutrons sont émis simultanément et sous la forme de paires fortement corrélées.